Ne m’accuse pas! Écoute moi plutôt. Laisse moi t’expliquer pourquoi. Pourquoi j’ai fait ce que d’autres appellent l’impardonnable.
Sache déjà que ça n’a absolument rien à voir avec toi. Ni de près. Ni de loin.
Et crois le ou pas, ça n’a rien à voir avec ton père. Oui, c’est sûr, on se dispute, on s’engueule et même des fois, on se traite de cons! Il y a des hauts et des bas. Je ne le nie pas. Est-ce de ma faute? Des fois oui. Des fois non. Mais ce n’est pas le sujet ici.
Le vrai sujet est: pourquoi n’était-ce pas suffisant ? Qui suis-je pour remettre en question les lois immuables du mariage. De quel droit je peux commettre l’irréparable ? Pourquoi tu as honte de moi?
Les hormones? L’envie? Mon côté débridé ? J’ai honte? Pourquoi ? Avais-je envie de lui faire de la peine? Je vais répondre à tes questions...
Sache que la société est hypocrite. Parce que l’adultère ne date pas d’hier! De plus, c’est encore aujourd’hui bien mieux accepté quand c’est un homme que quand c’est une femme. Quelle injustice non?
Il est dans la force de l’âge et c’est une traînée !
Bravo la mentalité ! Cendrillon et Blanche Neige ne sont que des cruches!
Je m’égare désolée. C’était pour te dire que dès notre plus jeune âge, on nous formate. Le prince charmant, tout ça... happily ever after...
J’ai eu de la chance. J’ai fondé ma famille. Mon job tient la route. J’ai des amis. Une vie sociale. Une belle réussite diraient certains. De quoi s’arrêter là diraient d’autres.
S’arrêter? Attends pardon? S’arrêter de quoi? De vivre? N’avoir plus aucun objectif? Attendre la mort ? Sans rien entre les deux? Plus de petites sensations de plaisir?
Mais non! Mais je ne veux pas moi! Il doit bien y avoir... autre chose ! Ce n’est pas possible!
Alors je réfléchis... ça tourne en boucle... comment profiter de la vie du mieux que je peux? Et puis autour de moi, il commence à y avoir des décès (c’est l’âge...), des séparations, des petits ou gros trucs qui font que tu vois la ligne se rapprocher... une sorte d’urgence. Le démon de midi? La crise de la quarantaine ?
Alors je réfléchis encore... est-ce possible ? J’ouvre mes œillères... tiens... il est beau ce collègue. C’est marrant comme il louche sur mon décolleté. Il n’a pas honte? Je suis une femme mariée moi!
En même temps je ne reste pas indifférente j’avoue. Il est beau quoi... je me sens comme une adolescente quand il me parle. Je ne dérive pas. On est au boulot.
Mais la graine est semée...
J’aimais comme il me regardait. J’avoue. J’en rougis... et j’ai un sourire niais qui apparaît. Depuis quand je n’ai pas souri comme ça tiens ?
Je plais? Ô vanité ! Moi? La femme mariée et maman? Avec son alliance bien en évidence ?
J’aimerais bien revenir en arrière et profiter de cette occasion. Être libre. Mais non! Surtout pas! Ça remettrait en cause tout ce que j’ai construit!
Alors je réfléchis... la honte s’abat sur moi d’y penser. De plus en plus! Je ne pense plus qu’à ça en fait!
Et puis un soir, je m’ennuie... je vais sur un site de tchat. Des échanges. Plus ou moins sympa. Quelqu’un qui me drague. Je coupe. J’ai peur. Arrête Charlotte ! Ça dérape!
J’y reviens plus tard. Tel Icare attiré par le soleil. Ça a un goût d’interdit. J’en ai le cœur qui bat. Je me cache. Je souris à nouveau. J’aime ça... ça ressemble à ... à ... heu... on dirait que ça ressemble à vivre. Non?
Alors je me connecte. Encore une fois. Et encore. J’échange. Je plais. On me désire ! Un truc de fou! Depuis quand il ne m’a pas désiré comme ça ton père? Et depuis quand je ne l’ai pas désiré ? Vraiment désiré ! La routine, les soucis quotidiens. Ça nous tue. Je le connais par coeur lui. Son grain de peau. Sa façon de bouger. Je peux tout anticiper. Ce n’est pas désagréable note bien. Mais est-ce suffisant jusqu’à la fin de ma vie?
Alors j’accepte de rencontrer cet homme qui se sent délaissé par sa femme. Il se sent seul. Le sexe n’est plus ce qu’il était et surtout il a besoin d’oxygène. Comme moi.
Je ne le fais pas par rapport à quelqu’un mais pour moi. Pour vivre...
Ne m’en veux pas. Je n’ai qu’une vie...